Dire que j'écoute Kornstad en boucle serait exagéré. Il m'arrive de sortir de ma tanière, de sauter par dessus les immenses flaques d'eau sombre qui commencent à transformer en gymkhana toute traversée à pied de Riga. Il m'arrive, le temps d'un café ou de quelques verres, de rencontrer du monde qui, comme moi, a le regard hâve du survivant de l'hiver nordique, avec prunelles en attente de clartés sans fin (alors, ça vient!?).
Mais il ne me lâche pas, Håkon Kornstad. J'y reviens sans cesse depuis quelques jours. Les volutes de son saxophone s'insinuent dans mes neurones, ses vibratos me chatouillent la couenne, son inventivité lascive fait fondre ma gangue externe, que sais-je encore! C'est le songe d'une longue nuit d'été promise qu'on ne voudrait surtout pas manquer.
Le souffleur ultrasensible de Dwell Time, enregistré en solo l'an dernier, n'a pas toujours été aussi feutré. Je me rappelle de ses dérapages contrôlés sur le beat électronique de Wibutee, une des locomotives du jazz contemporain foisonnant en Norvège. Et plus encore de ses saillies rythmées par les tambours de Paal Nilssen-Love (Schlinger)... Ou encore de l'hommage qu'il rend aux maîtres, comme ici dans le morceau King Korn.
Que dire de plus, si ce n'est qu'un type d'à peine 33 ans qui trouve que le jazz est "une musique bâtarde se mélangeant impitoyablement avec d’autres styles pour en faire quelque chose de nouveau à un moment donné" ne saurait être un mauvais bougre?
samedi 27 février 2010
jeudi 25 février 2010
Pierre Lellouche en tournée Mistral décoiffante
Finalement c'est à Pierre Lellouche, et non à Hervé Morin, qu'est revenu le soin d'aller faire passer la pillule "Mistral" auprès des Baltes. Comme je le racontais ici le 22 décembre dernier, le ministre français de la défense était attendu de pied ferme le long de la Baltique. Est-ce pour tenter d'esquiver que Paris a préféré dépêcher un responsable moins exposé? En tant que secrétaire d'Etat chargé des affaires européennes, Pierre Lellouche n'est pas en prise directe avec le dossier de la vente du porte-hélicoptères de classe Mistral (photo AFP lors d'une escale de démonstration à Saint-Pétersbourg en novembre dernier).
Cela n'a pas empêché les Lituaniens, hier, de faire savoir à l'émissaire français ce qu'ils pensaient du projet bien avancé de vente de ce navire ultramoderne à la Russie, voisine directe dont on apprécie guère ici le réarmement progressif. Ce contrat, s'il était conclu, constituerait en outre un précédent au sein de l'Otan: aucun de ses membre n'a jusqu'à présent osé vendre un tel équipement à l'héritière de l'URSS qui, aujourd'hui, se revendique volontiers de ce passé encore tout frais.
On imagine la tonalité tonique de l'entretien entre Pierre Lellouche et la dynamique présidente Dalia Grybauskaite qui, en général, n'y va pas par quatre chemins... J'ai pu le constater lors d'une interview très tac-au-tac réalisée avec cette ancienne ceinture noire de karaté pour la revue Politique Internationale, publié dans sa dernière livraison (n° 126).
Dalia Grybauskaite a eu beau jeu de rappeler à son hôte qu'un minimum de consultations politiques s'imposait entre "partenaires stratégiques". La France et la Lituanie sont toutes deux membres de l'Otan et, qui plus est, ont signé l'an dernier un accord de partenariat stratégique.
Pierre Lellouche s'est en tiré en affirmant que Paris n'avait pas encore reçu de demande officielle russe d'achat du Mistral. Et que, de toutes façons, ledit navire serait livré sans équipement militaire. Donc pas de transfert de technologie militaire à la Russie! Ce message, il le répètera cet après-midi en Lettonie et demain en Estonie, tout en limitant au maximum les rencontres avec la presse (au nom d'un agenda chargé).
Cela ne semble pas pour autant chagriner Moscou qui, d'après des experts militaires lituaniens cités par l'agence Reuters, est surtout intéressée par la capacité du Mistral à déployer rapidement des troupes en un endroit donné. Comptons sur la Russie, si elle achète le navire, pour rapidement l'armer comme il faut. Auprès de marchands d'armes russes, qui auraient besoin d'être réconfortés après le camouflet Mistral; ou auprès de marchands français, pourquoi pas?
Cela n'a pas empêché les Lituaniens, hier, de faire savoir à l'émissaire français ce qu'ils pensaient du projet bien avancé de vente de ce navire ultramoderne à la Russie, voisine directe dont on apprécie guère ici le réarmement progressif. Ce contrat, s'il était conclu, constituerait en outre un précédent au sein de l'Otan: aucun de ses membre n'a jusqu'à présent osé vendre un tel équipement à l'héritière de l'URSS qui, aujourd'hui, se revendique volontiers de ce passé encore tout frais.
On imagine la tonalité tonique de l'entretien entre Pierre Lellouche et la dynamique présidente Dalia Grybauskaite qui, en général, n'y va pas par quatre chemins... J'ai pu le constater lors d'une interview très tac-au-tac réalisée avec cette ancienne ceinture noire de karaté pour la revue Politique Internationale, publié dans sa dernière livraison (n° 126).
Dalia Grybauskaite a eu beau jeu de rappeler à son hôte qu'un minimum de consultations politiques s'imposait entre "partenaires stratégiques". La France et la Lituanie sont toutes deux membres de l'Otan et, qui plus est, ont signé l'an dernier un accord de partenariat stratégique.
Pierre Lellouche s'est en tiré en affirmant que Paris n'avait pas encore reçu de demande officielle russe d'achat du Mistral. Et que, de toutes façons, ledit navire serait livré sans équipement militaire. Donc pas de transfert de technologie militaire à la Russie! Ce message, il le répètera cet après-midi en Lettonie et demain en Estonie, tout en limitant au maximum les rencontres avec la presse (au nom d'un agenda chargé).
Cela ne semble pas pour autant chagriner Moscou qui, d'après des experts militaires lituaniens cités par l'agence Reuters, est surtout intéressée par la capacité du Mistral à déployer rapidement des troupes en un endroit donné. Comptons sur la Russie, si elle achète le navire, pour rapidement l'armer comme il faut. Auprès de marchands d'armes russes, qui auraient besoin d'être réconfortés après le camouflet Mistral; ou auprès de marchands français, pourquoi pas?
samedi 20 février 2010
Exit la "non-alliance", la Suède est active... euh, "non-passive"!
Tout est affaire de nuances, surtout lorsqu’on aborde la politique de sécurité suédoise. Chaque année en cette saison, experts et diplomates soupèsent le moindre mot prononcé par le ou la ministre des affaires étrangères du royaume dans le discours inaugurant le traditionnel débat parlementaire sur la chose.
Coïncidence, je passais par Stockholm ce jour-là (le 17 février), de retour d'Islande. Pourquoi ne pas en profiter pour écouter Carl Bildt présenter, dans sa nouvelle mouture, la doctrine diplomatique de son pays? Laquelle évolue peu à peu. Dans la nuance, comme il se doit... Pour résumer, d'officiellement "neutre" depuis 1814, ce qui lui a permis de passer entre les gouttes des deux grandes guerres du siècle dernier, la Suède est devenue "neutre en temps de guerre et non-alliée en temps de paix" après la disparition de l'URSS. Puis le "neutre" a disparu à la faveur de l'adhésion à l'UE. Le royaume s'est alors proclamé "libre d'alliance militaire". Cela signifie quoi? Qu'il n'est pas lié par des accords l'engageant dans des garanties de défense réciproques - et donc qu'il est censé pouvoir se défendre tout seul (en dépit du net rapetissement de ses forces armées). Cela ne l'empêche pas de prendre part à "une large coopération militaire internationale". D'où la présence ponctuelle de soldats suédois en Afghanistan (au sein d'une opération menée par l'Otan...), en Afrique, etc.
Alors qu'a donc dit Carl Bildt (photo), le 17 février, du haut de son magistère diplomatique, lui qui - contrairement à la plupart de ses homologues européens - a les coudées franches dans son domaine de prédilection? Il a beaucoup parlé, comme à son habitude, et dans toutes les directions. Mais il y a une expression qu'il n'a pas prononcée... La "non-alliance" militaire! Alors... à la trappe, la fameuse réserve de la Suède dans le domaine?
Non, du moins pas en apparence. Du calme, nous sommes à Stockholm! Le bon Carl Bildt nous a doctement expliqué que, si d'aventure les autres Etats membres de l'UE et les pays nordiques non-membres (Norvège et Islande) venaient à être frappés par une "catastrophe naturelle" ou être la victime d'une "agression", "la Suède ne resterait pas passive".
De "non-alliée", la puissance régionale devient donc "non-passive". On ne peut s'empêcher de sourire devant tant de hardiesse. Les pays concernés peuvent être rassurés! Si j'étais un citoyen estonien ou letton mal dans sa peau pour cause d'activisme russe à ses frontières, je m'empresserais d'envoyer un courriel de remerciements à Stockholm... Au sein du gouvernement suédois, les alliés libéraux de Carl Bildt se sont montrés plus démonstratifs dans leur volonté de faire face à l'imprévisible Russie, y compris en proposant de remilitariser l'île de Gotland, au large duquel passera bientôt le gazoduc Nord Stream si cher à Vladimir Poutine.
On sent bien toutefois que Bildt aurait aimé pousser le bouchon plus loin dans sa formulation. Ne pas rester passif, c'est trop peu pour cet ancien émissaire dans les Balkans, adepte de l'action et du verbe haut, voire tranchant (la comparaison de l'attaque russe d'août 2008 contre la Géorgie avec la doctrine de Hitler, c'est lui). Mais l'ancien premier conservateur doit composer avec une opinion publique suédoise ultra-prudente, qui a horreur qu'on la brusque. Le pays n'a pas connu de guerre sur son territoire depuis près de deux siècles, c'est presque inscrit dans les gênes de ses neuf millions d'habitants.
Le seul fait que l'inflexion sémantique impulsée par Bildt ait eu lieu à sept mois des élections législatives est donc un (petit) événement en soi. D'autant plus qu'entre lignes, il annonce que la Suède est prête à se porter au secours de pays membres de l'Otan (tous ses voisins nordiques et baltes le sont, Finlande exceptée)! Cette évolution, le ministre l'a justifiée - à raison - par l'entrée en vigueur du traité de Lisbonne, qui comprend une clause d'assistance mutuelle entre Etats membres de l'UE en cas d'"agression armée". Cela lui a permis de montrer du doigt Bruxelles à ceux qui, à gauche, lui reprochent de bousculer les choses et conduire en catimini la Suède vers l'Otan.
Pourtant, le même traité de Lisbonne stipule aussi que la clause précitée "n'affecte pas le caractère spécifique de la politique de sécurité et de défense de certains Etats membres", c'est-à-dire ceux qui se veulent encore "neutres" ou "non-alliés": la Finlande, l'Irlande et... la Suède? Eh bien non, plus maintenant, à en croire l'orientation prise par le gouvernement actuel.
A y regarder de plus près, la formule choisie par Bildt contient ce qu'il faut d'imprécision pour être interprétée de manières très différentes. Laissons de côté le scénario de la catastrophe naturelle, nécessairement plus consensuel, et concentrons-nous sur celui d'une agression (qu'elle soit d'ordre terroriste ou militaire). Que signifie l'expression "ne pas rester passif"? La gamme de réactions qu'elle autorise est vaste, de la simple condamnation officielle à l'assistance militaire, en matériel voire en hommes. Dans ce dernier cas, on serait loin de la neutralité si longtemps chérie par les Suédois.
Et Carl Bildt de préciser sa pensée dans la phrase suivante: "Nous attendons de ces pays [les membres de l'UE et la Norvège, pour la plupart membres de l'Otan] qu'ils agissent de la même façon", donc "non passive", si la Suède était la cible d'une agression.
Le principe d'entraide mutuelle entre pays membres d'une même organisation en cas d'agression contre l'un d'entre eux, cela ne vous rappelle pas vaguement le fonctionnement de l'Otan, avec son fameux article 5? La Suède n'en est pas (encore?) à frapper à la porte de cette alliance militaire mais, sous la conduite des conservateurs et de leurs alliés libéraux, elle s'en rapproche tout doucement.
Les législatives du 19 septembre dans le pays ne se joueront pas sur ce dossier mais de leur résultat dépendra l'enterrement définitif de la non-alliance militaire suédoise, voire de sa toute récente "non-passivité"...
Coïncidence, je passais par Stockholm ce jour-là (le 17 février), de retour d'Islande. Pourquoi ne pas en profiter pour écouter Carl Bildt présenter, dans sa nouvelle mouture, la doctrine diplomatique de son pays? Laquelle évolue peu à peu. Dans la nuance, comme il se doit... Pour résumer, d'officiellement "neutre" depuis 1814, ce qui lui a permis de passer entre les gouttes des deux grandes guerres du siècle dernier, la Suède est devenue "neutre en temps de guerre et non-alliée en temps de paix" après la disparition de l'URSS. Puis le "neutre" a disparu à la faveur de l'adhésion à l'UE. Le royaume s'est alors proclamé "libre d'alliance militaire". Cela signifie quoi? Qu'il n'est pas lié par des accords l'engageant dans des garanties de défense réciproques - et donc qu'il est censé pouvoir se défendre tout seul (en dépit du net rapetissement de ses forces armées). Cela ne l'empêche pas de prendre part à "une large coopération militaire internationale". D'où la présence ponctuelle de soldats suédois en Afghanistan (au sein d'une opération menée par l'Otan...), en Afrique, etc.
Alors qu'a donc dit Carl Bildt (photo), le 17 février, du haut de son magistère diplomatique, lui qui - contrairement à la plupart de ses homologues européens - a les coudées franches dans son domaine de prédilection? Il a beaucoup parlé, comme à son habitude, et dans toutes les directions. Mais il y a une expression qu'il n'a pas prononcée... La "non-alliance" militaire! Alors... à la trappe, la fameuse réserve de la Suède dans le domaine?
Non, du moins pas en apparence. Du calme, nous sommes à Stockholm! Le bon Carl Bildt nous a doctement expliqué que, si d'aventure les autres Etats membres de l'UE et les pays nordiques non-membres (Norvège et Islande) venaient à être frappés par une "catastrophe naturelle" ou être la victime d'une "agression", "la Suède ne resterait pas passive".
De "non-alliée", la puissance régionale devient donc "non-passive". On ne peut s'empêcher de sourire devant tant de hardiesse. Les pays concernés peuvent être rassurés! Si j'étais un citoyen estonien ou letton mal dans sa peau pour cause d'activisme russe à ses frontières, je m'empresserais d'envoyer un courriel de remerciements à Stockholm... Au sein du gouvernement suédois, les alliés libéraux de Carl Bildt se sont montrés plus démonstratifs dans leur volonté de faire face à l'imprévisible Russie, y compris en proposant de remilitariser l'île de Gotland, au large duquel passera bientôt le gazoduc Nord Stream si cher à Vladimir Poutine.
On sent bien toutefois que Bildt aurait aimé pousser le bouchon plus loin dans sa formulation. Ne pas rester passif, c'est trop peu pour cet ancien émissaire dans les Balkans, adepte de l'action et du verbe haut, voire tranchant (la comparaison de l'attaque russe d'août 2008 contre la Géorgie avec la doctrine de Hitler, c'est lui). Mais l'ancien premier conservateur doit composer avec une opinion publique suédoise ultra-prudente, qui a horreur qu'on la brusque. Le pays n'a pas connu de guerre sur son territoire depuis près de deux siècles, c'est presque inscrit dans les gênes de ses neuf millions d'habitants.
Le seul fait que l'inflexion sémantique impulsée par Bildt ait eu lieu à sept mois des élections législatives est donc un (petit) événement en soi. D'autant plus qu'entre lignes, il annonce que la Suède est prête à se porter au secours de pays membres de l'Otan (tous ses voisins nordiques et baltes le sont, Finlande exceptée)! Cette évolution, le ministre l'a justifiée - à raison - par l'entrée en vigueur du traité de Lisbonne, qui comprend une clause d'assistance mutuelle entre Etats membres de l'UE en cas d'"agression armée". Cela lui a permis de montrer du doigt Bruxelles à ceux qui, à gauche, lui reprochent de bousculer les choses et conduire en catimini la Suède vers l'Otan.
Pourtant, le même traité de Lisbonne stipule aussi que la clause précitée "n'affecte pas le caractère spécifique de la politique de sécurité et de défense de certains Etats membres", c'est-à-dire ceux qui se veulent encore "neutres" ou "non-alliés": la Finlande, l'Irlande et... la Suède? Eh bien non, plus maintenant, à en croire l'orientation prise par le gouvernement actuel.
A y regarder de plus près, la formule choisie par Bildt contient ce qu'il faut d'imprécision pour être interprétée de manières très différentes. Laissons de côté le scénario de la catastrophe naturelle, nécessairement plus consensuel, et concentrons-nous sur celui d'une agression (qu'elle soit d'ordre terroriste ou militaire). Que signifie l'expression "ne pas rester passif"? La gamme de réactions qu'elle autorise est vaste, de la simple condamnation officielle à l'assistance militaire, en matériel voire en hommes. Dans ce dernier cas, on serait loin de la neutralité si longtemps chérie par les Suédois.
Et Carl Bildt de préciser sa pensée dans la phrase suivante: "Nous attendons de ces pays [les membres de l'UE et la Norvège, pour la plupart membres de l'Otan] qu'ils agissent de la même façon", donc "non passive", si la Suède était la cible d'une agression.
Le principe d'entraide mutuelle entre pays membres d'une même organisation en cas d'agression contre l'un d'entre eux, cela ne vous rappelle pas vaguement le fonctionnement de l'Otan, avec son fameux article 5? La Suède n'en est pas (encore?) à frapper à la porte de cette alliance militaire mais, sous la conduite des conservateurs et de leurs alliés libéraux, elle s'en rapproche tout doucement.
Les législatives du 19 septembre dans le pays ne se joueront pas sur ce dossier mais de leur résultat dépendra l'enterrement définitif de la non-alliance militaire suédoise, voire de sa toute récente "non-passivité"...
mardi 16 février 2010
Les JO dans les JO
Et une médaille olympique pour l'Estonie! En ski de fond bien sûr, spécialité locale. Une médaille pour l'Estonie, c'est aussi bien que la Suède (Charlotte Kalla, photo Scanpix), six fois plus peuplée qu'elle, et mieux que la "grande soeur" finlandaise qui, pour l'instant, n'a encore rien décroché aux JO de Vancouver. La Norvège, elle, compte trois médailles à ce jour, mais aucune d'or.
Si je me livre à ce petit décompte, c'est parce que les pays du Nord de l'Europe n'aiment rien tant que se mesurer entre eux. Qui est le plus riche par tête d'habitant, le plus généreux (ou le plus pingre) dans l'aide au développement, le plus lourd en terme de fiscalité, le plus "égalitaire", le mieux placé ici, le moins bien classé là...
Pas étonnant donc que le sport soit un domaine privilégié pour ce genre de joutes cocardières, qui restent le plus souvent bon enfant. Comme je le raconte dans La Croix de ce matin, rien ne stimule plus les Nordiques qu'un bon vieux derby régional au sommet de l'élite mondiale, genre Suède-Finlande en finale du hockey-sur-glace aux JO de Turin (2006), remportée par la première.
Alors qui de la Suède ou de la Norvège récoltera le plus grand nombre de médailles à Vancouver? Les paris sont ouverts...
Si je me livre à ce petit décompte, c'est parce que les pays du Nord de l'Europe n'aiment rien tant que se mesurer entre eux. Qui est le plus riche par tête d'habitant, le plus généreux (ou le plus pingre) dans l'aide au développement, le plus lourd en terme de fiscalité, le plus "égalitaire", le mieux placé ici, le moins bien classé là...
Pas étonnant donc que le sport soit un domaine privilégié pour ce genre de joutes cocardières, qui restent le plus souvent bon enfant. Comme je le raconte dans La Croix de ce matin, rien ne stimule plus les Nordiques qu'un bon vieux derby régional au sommet de l'élite mondiale, genre Suède-Finlande en finale du hockey-sur-glace aux JO de Turin (2006), remportée par la première.
Alors qui de la Suède ou de la Norvège récoltera le plus grand nombre de médailles à Vancouver? Les paris sont ouverts...
samedi 13 février 2010
L'Islande, obscur mystère
"L'Islande attend. Elle attend qu'Eva Joly, venue à son secours, retrouve l'argent caché dans les paradis fiscaux. Elle attend un mieux, un client pour son énergie bon marché, un nouveau prêt du FMI, une éclaircie. Elle n'est sûre que d'une chose : les jours rallongent." Ainsi se termine l'article de Gérard Lemarquis dans Le Monde daté du 12 février (L'Islande, le maelström de la crise).
Les jours rallongent, et c'est tant mieux. Car pour l'étranger de passage à Reykjavik, l'obscurité hivernale reste un phénomène étrange qui peut jouer des tours... Se lever tôt le matin quand on sait que le ciel restera d'encre pendant encore quelques heures exige une certaine discipline (et mieux vaut ne pas écouter cette musique-là au lever du lit...).
Je me souviens d'un rendez-vous pris en janvier 2009 sur les coups de dix heures du matin (photo ci-dessous). Le soleil ne s'était pas encore pointé à l'horizon. Et encore, le ciel était clair ce jour-là. Lorsqu'il est pris sous une chape de nuages, c'est à peine si on aperçoit la rive opposée du fjord et la montagne Esja. La ville est alors encalminée dans une mélasse blafarde.
J'avais donc rendez- vous avec Matthias Halldors- son, le respon- sable de la Direction de la Santé. Le magazine GEO m'avait commandé un article sur comment les Islandais vivent l'obscurité hivernale et sur leurs petites astuces pour la rendre plus supportable. Mes questions étonnaient visiblement mon interlocuteur. "Non, je n'ai jamais pensé à l'obscurité comme un problème"... Ni pour lui-même, ni pour la santé publique.
Ah? Comme je le rappelais dans GEO, la latitude de Reykjavik (64°09 Nord) est pourtant semblable à celle de Nuuk, la "capitale" du Groenland. Le jour du solstice d’hiver, le 21 décembre, le soleil se lève à 11h23 sur la capitale islandaise pour se coucher à 15h30… Sur le littoral septentrional de l’île, qui flirte avec le cercle polaire arctique, la lumière naturelle se fait encore plus discrète. Au cœur de l’hiver, les habitants de certains fjords encaissés ne voient pas le soleil pendant plusieurs semaines. Ambiance fin du monde (ci-dessous à Akureyri).
Se pourrait-il que les Islandais soient faits d’un métal qui résiste à l’absence de clarté? Le mystère s’était épaissi à l’écoute d’Andres Magnusson, l’un des spécialistes mondiaux de la dépression hivernale. Baptisée SAD (seasonal affective disorder) dans le jargon médical, elle se traduit notamment par une fatigue permanente, un manque d’énergie chronique, une irritabilité accrue, une envie de rester à l’écart du monde. "Tout corps humain a son horloge interne. Elle a besoin de lumière pour produire son propre rythme, sinon elle se désynchronise", m'expliqua-t-il devant une assiette de morue avalée à la cantine de l’hôpital de Reykjavik. "Alors bien sûr, il y a des Islandais qui souffrent de ce phénomène. Mais pas plus de 3% d’entre eux présentent tous les symptômes de cette dépression particulière. Environ 20% éprouvent des difficultés, alors que la moitié de la population ne ressent rien."
Plus étonnant encore, le fait que les Islandais ne soient pas davantage sujets à ce type de dépression que des populations vivant sous des latitudes moins élevées, aux Etats-Unis notamment. Plusieurs études réalisées depuis les années 1990 l’attestent. Une autre, effectuée par Andres Magnusson au Canada, montre que les descendants d’Islandais installés à Winnipeg sont moins sensibles au phénomène que les habitants de souche… Existerait-il un gène renforçant la résistance à la dépression hivernale?
Le reste de l'enquête est à lire dans le GEO de mai 2009...
Les jours rallongent, et c'est tant mieux. Car pour l'étranger de passage à Reykjavik, l'obscurité hivernale reste un phénomène étrange qui peut jouer des tours... Se lever tôt le matin quand on sait que le ciel restera d'encre pendant encore quelques heures exige une certaine discipline (et mieux vaut ne pas écouter cette musique-là au lever du lit...).
Je me souviens d'un rendez-vous pris en janvier 2009 sur les coups de dix heures du matin (photo ci-dessous). Le soleil ne s'était pas encore pointé à l'horizon. Et encore, le ciel était clair ce jour-là. Lorsqu'il est pris sous une chape de nuages, c'est à peine si on aperçoit la rive opposée du fjord et la montagne Esja. La ville est alors encalminée dans une mélasse blafarde.
J'avais donc rendez- vous avec Matthias Halldors- son, le respon- sable de la Direction de la Santé. Le magazine GEO m'avait commandé un article sur comment les Islandais vivent l'obscurité hivernale et sur leurs petites astuces pour la rendre plus supportable. Mes questions étonnaient visiblement mon interlocuteur. "Non, je n'ai jamais pensé à l'obscurité comme un problème"... Ni pour lui-même, ni pour la santé publique.
Ah? Comme je le rappelais dans GEO, la latitude de Reykjavik (64°09 Nord) est pourtant semblable à celle de Nuuk, la "capitale" du Groenland. Le jour du solstice d’hiver, le 21 décembre, le soleil se lève à 11h23 sur la capitale islandaise pour se coucher à 15h30… Sur le littoral septentrional de l’île, qui flirte avec le cercle polaire arctique, la lumière naturelle se fait encore plus discrète. Au cœur de l’hiver, les habitants de certains fjords encaissés ne voient pas le soleil pendant plusieurs semaines. Ambiance fin du monde (ci-dessous à Akureyri).
Se pourrait-il que les Islandais soient faits d’un métal qui résiste à l’absence de clarté? Le mystère s’était épaissi à l’écoute d’Andres Magnusson, l’un des spécialistes mondiaux de la dépression hivernale. Baptisée SAD (seasonal affective disorder) dans le jargon médical, elle se traduit notamment par une fatigue permanente, un manque d’énergie chronique, une irritabilité accrue, une envie de rester à l’écart du monde. "Tout corps humain a son horloge interne. Elle a besoin de lumière pour produire son propre rythme, sinon elle se désynchronise", m'expliqua-t-il devant une assiette de morue avalée à la cantine de l’hôpital de Reykjavik. "Alors bien sûr, il y a des Islandais qui souffrent de ce phénomène. Mais pas plus de 3% d’entre eux présentent tous les symptômes de cette dépression particulière. Environ 20% éprouvent des difficultés, alors que la moitié de la population ne ressent rien."
Plus étonnant encore, le fait que les Islandais ne soient pas davantage sujets à ce type de dépression que des populations vivant sous des latitudes moins élevées, aux Etats-Unis notamment. Plusieurs études réalisées depuis les années 1990 l’attestent. Une autre, effectuée par Andres Magnusson au Canada, montre que les descendants d’Islandais installés à Winnipeg sont moins sensibles au phénomène que les habitants de souche… Existerait-il un gène renforçant la résistance à la dépression hivernale?
Le reste de l'enquête est à lire dans le GEO de mai 2009...
mercredi 10 février 2010
Icesave, sauve qui peut
La rébellion islandaise s'organise. Aujourd'hui, lancement officiel de la campagne initiée par une association contre la loi Icesave, vécue comme inique par une partie de la population de l'île (voir mon billet du 5 janvier, Le pari risqué d'Olafur). A moins d'un mois du référendum sur le sujet, conférence de presse dans un grand hôtel de Reykjavik. En rang d'oignon, sept hommes en noir attendent les journalistes de pied ferme.
Ce sont les fondateurs d'InDefence, une association lancée par des citoyens islandais en plein dans la tourmente financière d'octobre 2008, initialement pour protester contre le sale coup administré par Londres: l'île nordique venait alors d'être rangée, au côté d'Al Qaida et des talibans, parmi les cibles de la législation antiterroriste britannique...
Les sept justiciers en noir ne mâchent pas leurs mots face aux journalistes, à peine plus nombreux qu'eux dans la salle (des questions arrivent aussi par courriel). Leur message en substance est d'une grande simplicité: "Les gouvernements britannique et néerlandais n'ont aucun droit de nous demander à nous, contribuables, de payer pour compenser les épargnants de ces pays ayant été blousés par Icesave. Les économies de ces épargnants ne sont jamais arrivées en Islande, nous n'en avons pas bénéficié. Les Britanniques et Néerlandais n'ont aucune base légale pour exiger de notre part ces 3,9 milliards d'euros, qui plus est avec des taux d'intérêt de 5,5%, tout en bloquant l'aide du FMI tant que le dossier n'est pas réglé!" A bon entendeur salut.
Les arguments font naturellement mouche chez les Islandais qui, après avoir grandement croqué à la pomme de la prospérité, ont pas mal d'autres soucis en tête ces derniers temps. Des ménages n'arrivent plus à rembourser leurs emprunts (contractés souvent de manière imprudente, sur le conseil de banques tentatrices), les faillites se multiplient, le chômage augmente, les candidats à l'émigration vers la Norvège ou ailleurs commencent à se bousculer au portillon, etc.
Bref, le 6 mars, il y a très peu de chances que les Islandais approuvent une loi (Icesave) qui alourdira encore la barque... Même si elle a déjà été adoptée par leur parlement (photo) fin décembre 2009. D'où les tentatives actuelles, menées en coulisse par le gouvernement de Reykjavik, en vue de renégocier l'accord conclu avec Londres et La Haye. Ce qui permettrait d'annuler la tenue du référendum. Les autorités veulent croire que les Britanniques et les Néerlandais y ont aussi intérêt. Mais le temps presse: les Islandais de l'étranger ont déjà commencé à voter...
Ce sont les fondateurs d'InDefence, une association lancée par des citoyens islandais en plein dans la tourmente financière d'octobre 2008, initialement pour protester contre le sale coup administré par Londres: l'île nordique venait alors d'être rangée, au côté d'Al Qaida et des talibans, parmi les cibles de la législation antiterroriste britannique...
Les sept justiciers en noir ne mâchent pas leurs mots face aux journalistes, à peine plus nombreux qu'eux dans la salle (des questions arrivent aussi par courriel). Leur message en substance est d'une grande simplicité: "Les gouvernements britannique et néerlandais n'ont aucun droit de nous demander à nous, contribuables, de payer pour compenser les épargnants de ces pays ayant été blousés par Icesave. Les économies de ces épargnants ne sont jamais arrivées en Islande, nous n'en avons pas bénéficié. Les Britanniques et Néerlandais n'ont aucune base légale pour exiger de notre part ces 3,9 milliards d'euros, qui plus est avec des taux d'intérêt de 5,5%, tout en bloquant l'aide du FMI tant que le dossier n'est pas réglé!" A bon entendeur salut.
Les arguments font naturellement mouche chez les Islandais qui, après avoir grandement croqué à la pomme de la prospérité, ont pas mal d'autres soucis en tête ces derniers temps. Des ménages n'arrivent plus à rembourser leurs emprunts (contractés souvent de manière imprudente, sur le conseil de banques tentatrices), les faillites se multiplient, le chômage augmente, les candidats à l'émigration vers la Norvège ou ailleurs commencent à se bousculer au portillon, etc.
Bref, le 6 mars, il y a très peu de chances que les Islandais approuvent une loi (Icesave) qui alourdira encore la barque... Même si elle a déjà été adoptée par leur parlement (photo) fin décembre 2009. D'où les tentatives actuelles, menées en coulisse par le gouvernement de Reykjavik, en vue de renégocier l'accord conclu avec Londres et La Haye. Ce qui permettrait d'annuler la tenue du référendum. Les autorités veulent croire que les Britanniques et les Néerlandais y ont aussi intérêt. Mais le temps presse: les Islandais de l'étranger ont déjà commencé à voter...
mardi 9 février 2010
Un "je ne sais quoi" d'embêtant
A Reykjavik depuis ce week-end, pour des reportages à venir dans Challenges et La Croix. L'Islande, l'endroit idéal pour alimenter un blog de photos originales. Hélas, mon brave appareil, acheté il y a quatre ans, a rendu l'âme, semble-t-il pour de bon. Encéphalogramme plat. Voici les derniers clichés que j'ai pu extirper du cadavre lors d'une autopsie à froid.
Autant dire que sans mon appareil, je me sens un peu démuni... Voilà qui va réduire ma marge de manoeuvre, en particulier pour ce blog. Embêtant.
Par exemple, vous ne pourrez pas voir la diva rousse qui, en ce moment même, boit un verre à cinq mètres de moi, au Café Paris... Samedi soir, Hera Björk remportait la finale islandaise de l'Eurovision. Elle représentera donc son pays lors la prochaine édition européenne de l'événement, fin mai à Oslo.
Elle a du coffre et une sacrée voix, Hera Björk. Et une chanson qui pourrait plaire dans l'Hexagone, rien que pour son titre français: "Je ne sais quoi"...
Autant dire que sans mon appareil, je me sens un peu démuni... Voilà qui va réduire ma marge de manoeuvre, en particulier pour ce blog. Embêtant.
Par exemple, vous ne pourrez pas voir la diva rousse qui, en ce moment même, boit un verre à cinq mètres de moi, au Café Paris... Samedi soir, Hera Björk remportait la finale islandaise de l'Eurovision. Elle représentera donc son pays lors la prochaine édition européenne de l'événement, fin mai à Oslo.
Elle a du coffre et une sacrée voix, Hera Björk. Et une chanson qui pourrait plaire dans l'Hexagone, rien que pour son titre français: "Je ne sais quoi"...
vendredi 5 février 2010
Cette nuit-là, un inconnu
Les téléscripteurs crépitent, crachent sans relâche des dépêches à l'encre bleu passé. Il faudrait changer les rubans. Mais l'appelé de permanence cette nuit-là n'a pas envie de couper le fil. Son attention est ailleurs. Là, dans cette salle étroite du Sirpa, au ministère de la défense, boulevard St-Germain, les rubans de papier qui coulent sans fin racontent une histoire à laquelle il a dû mal à croire. Il n'en comprend pas vraiment la portée, si tant est qu'elle en ait une pour lui. Plus tard, il se demandera tout de même si cette nuit du 28 février au 1er mars 1986 a pu jouer un rôle dans son orientation future, direction Nord. Vous aurez reconnu l'identité de ce brave troufion...
Que faisiez-vous ce jour-là? Ou le lendemain, en apprenant la nouvelle?
C'est le genre de questions qu'on se pose les uns les autres, entre amis ou en famille, pour se remémorer un événement décisif. L'exemple qui vient tout de suite à l'esprit concerne le 11 septembre 2001. Nine eleven, comme on dit outre-Atlantique et ailleurs en outre. Pour les Suédois en âge de s'en souvenir, la nuit du 28 février au 1er mars 1986 reste une date-clé qui s'impose tout autant.
Il s'appelait Olof Palme, c'était un chef de gouvernement qui ne laissait pas grand-monde indifférent en son royaume, un renard politique au profil d'oiseau de proie. Il rentrait à pied d'un cinéma sur Sveavägen, en compagnie de sa femme Lisbeth. A cette époque, un premier ministre suédois pouvait se passer de gardes du corps. Jusqu'à ce que ce dirigeant social-démocrate ne tombe sous les balles d'un inconnu, qui lui tira dans le dos au coin d'une rue.
Traumatisme national. Fin de "l'innocence" suédoise présumée, "rien ne sera plus comme avant". Questionnements sans fin sur le pourquoi, le comment, avec ou sans complices, pour expier ou prévenir quelle faute, pour soulager quel déséquilibré, satisfaire quelle grande ou moyenne puissance, nuire à quelle autre, etc. Les pistes envisagées furent aussi nombreuses qu'il y a de manières d'accommoder les harengs de la Baltique: kurde, sud-africaine, CIA, KGB, Iran, extrême droite internationale et/ou suédoise, marchands d'armes, mari cocu, camé, paumé, taré...
Et toujours aucun coupable. Il y eut bien Christer Pettersson, un marginal à la mèche rebelle, amateur de substances illégales, en qui Lisbeth Palme crut reconnaître l'assassin. Condamné en 1ère instance, il fut acquitté en appel en 1989, pour manque de preuves (l'arme n'a jamais été retrouvée). Si c'est bien lui, comme il le laissa entendre par la suite avant de se raviser, il a emporté son demi-secret dans la tombe en 2004 et doit en ricaner encore.
Pourquoi l'évocation de cette histoire ancienne? D'après la législation suédoise, le meurtre aurait dû être prescrit fin février 2011. Mais la règle des 25 ans vient d'être abrogée par le parlement. Plus de prescription! Au sein de la police, les enquêteurs "du groupe Palme", l'unité dédiée à ce dossier désormais réduite à quatre personnes à plein temps, pourront continuer à s'arracher les cheveux à volonté sur cette énigme. Jusqu'à quand?
Que faisiez-vous ce jour-là? Ou le lendemain, en apprenant la nouvelle?
C'est le genre de questions qu'on se pose les uns les autres, entre amis ou en famille, pour se remémorer un événement décisif. L'exemple qui vient tout de suite à l'esprit concerne le 11 septembre 2001. Nine eleven, comme on dit outre-Atlantique et ailleurs en outre. Pour les Suédois en âge de s'en souvenir, la nuit du 28 février au 1er mars 1986 reste une date-clé qui s'impose tout autant.
Il s'appelait Olof Palme, c'était un chef de gouvernement qui ne laissait pas grand-monde indifférent en son royaume, un renard politique au profil d'oiseau de proie. Il rentrait à pied d'un cinéma sur Sveavägen, en compagnie de sa femme Lisbeth. A cette époque, un premier ministre suédois pouvait se passer de gardes du corps. Jusqu'à ce que ce dirigeant social-démocrate ne tombe sous les balles d'un inconnu, qui lui tira dans le dos au coin d'une rue.
Traumatisme national. Fin de "l'innocence" suédoise présumée, "rien ne sera plus comme avant". Questionnements sans fin sur le pourquoi, le comment, avec ou sans complices, pour expier ou prévenir quelle faute, pour soulager quel déséquilibré, satisfaire quelle grande ou moyenne puissance, nuire à quelle autre, etc. Les pistes envisagées furent aussi nombreuses qu'il y a de manières d'accommoder les harengs de la Baltique: kurde, sud-africaine, CIA, KGB, Iran, extrême droite internationale et/ou suédoise, marchands d'armes, mari cocu, camé, paumé, taré...
Et toujours aucun coupable. Il y eut bien Christer Pettersson, un marginal à la mèche rebelle, amateur de substances illégales, en qui Lisbeth Palme crut reconnaître l'assassin. Condamné en 1ère instance, il fut acquitté en appel en 1989, pour manque de preuves (l'arme n'a jamais été retrouvée). Si c'est bien lui, comme il le laissa entendre par la suite avant de se raviser, il a emporté son demi-secret dans la tombe en 2004 et doit en ricaner encore.
Pourquoi l'évocation de cette histoire ancienne? D'après la législation suédoise, le meurtre aurait dû être prescrit fin février 2011. Mais la règle des 25 ans vient d'être abrogée par le parlement. Plus de prescription! Au sein de la police, les enquêteurs "du groupe Palme", l'unité dédiée à ce dossier désormais réduite à quatre personnes à plein temps, pourront continuer à s'arracher les cheveux à volonté sur cette énigme. Jusqu'à quand?
mardi 2 février 2010
Pris dans la neige
Je m'étais juré de ne pas écrire ici sur le temps qu'il fait. Hors de question de transformer ce blog en site de Météo-Balte... Mais l'hiver prenant des proportions inhabituelles, je ne peux pas résister. Voilà que toute la région croule sous la neige. A Riga, on n'en avait pas vu autant depuis une quinzaine d'années. Ce matin (mardi), il y en avait une cinquantaine de centimètres.
Malgré un travail de déneigement exemplaire, jour et nuit, le personnel municipal de la capitale lettone a fini par être débordé. Ce matin, les tramways pataugeaient dans une mélasse blanchâtre. Plus question de tenir les horaires. La mairie avait pourtant invité les quelque 750 000 habitants à prendre les transports en commun pour se déplacer, alors que bon nombre de rues et de routes secondaires sont devenues impraticables en voiture. Le maire-adjoint de Riga, l'impulsif Ainars Slesers (ex-ministre des transports), a promis un effort supplémentaire, tout en reconnaissant que la ville était sous-équipée face à un enneigement exceptionnel.
L'hiver n'a pas que des effets négatifs en cette période de crise économique. La neige et la glace apportent leurs lots de distractions. Voilà ce qu'écrivait mon confrère Mike Collier il y a une semaine. La longue plage de Jurmala, proche de Riga, offre de superbes balades. En janvier, elle craquait déjà sous les pas. Le vent avait sculpté de minivagues gelées à même le sable...
Avec le froid des dernières semaines (le mercure est descendu jusqu'à -30° ici et là), la glace se forme dans le golfe de Riga et même une partie de la mer Baltique, comme le montre cette carte. Ainsi que cette photo, prise cet après-midi de l'avion m'amenant en Suède (le littoral est en bas):
Plus apocalyptique est l'atterrissage à Skavsta... Car, côté suédois, l'hiver n'est pas plus clément.
A Stockholm, où l'hiver n'a pas été aussi froid depuis 23 ans, les églises ont ouvert leurs portes aux SDF qui n'ont pas trouvé refuge ailleurs. Ils seraient environ 3500 au total à ne pas avoir de logement.
Là aussi, les services de déneigement sont débordés. Les transports en commun sont pris d'assaut, les bus ont perdu toute ponctualité. Les usagers râlent... Plus que ceux de Riga d'ailleurs, alors qu'objectivement (la neige mise à part) ils n'ont pas à se plaindre en comparaison des Lettons. Mais les Suédois sont habitués à ce que l'Etat assure tous les services auxquels ils estiment avoir droit, en contrepartie des impôts qu'ils payent (les plus lourds d'Europe). Les Lettons, eux, ne connaissent pas ce luxe. Jusqu'à ce que la neige ne tombe en quantité trop importante, chacun déblayait son pas de porte, tout seul.
Malgré un travail de déneigement exemplaire, jour et nuit, le personnel municipal de la capitale lettone a fini par être débordé. Ce matin, les tramways pataugeaient dans une mélasse blanchâtre. Plus question de tenir les horaires. La mairie avait pourtant invité les quelque 750 000 habitants à prendre les transports en commun pour se déplacer, alors que bon nombre de rues et de routes secondaires sont devenues impraticables en voiture. Le maire-adjoint de Riga, l'impulsif Ainars Slesers (ex-ministre des transports), a promis un effort supplémentaire, tout en reconnaissant que la ville était sous-équipée face à un enneigement exceptionnel.
L'hiver n'a pas que des effets négatifs en cette période de crise économique. La neige et la glace apportent leurs lots de distractions. Voilà ce qu'écrivait mon confrère Mike Collier il y a une semaine. La longue plage de Jurmala, proche de Riga, offre de superbes balades. En janvier, elle craquait déjà sous les pas. Le vent avait sculpté de minivagues gelées à même le sable...
Avec le froid des dernières semaines (le mercure est descendu jusqu'à -30° ici et là), la glace se forme dans le golfe de Riga et même une partie de la mer Baltique, comme le montre cette carte. Ainsi que cette photo, prise cet après-midi de l'avion m'amenant en Suède (le littoral est en bas):
Plus apocalyptique est l'atterrissage à Skavsta... Car, côté suédois, l'hiver n'est pas plus clément.
A Stockholm, où l'hiver n'a pas été aussi froid depuis 23 ans, les églises ont ouvert leurs portes aux SDF qui n'ont pas trouvé refuge ailleurs. Ils seraient environ 3500 au total à ne pas avoir de logement.
Là aussi, les services de déneigement sont débordés. Les transports en commun sont pris d'assaut, les bus ont perdu toute ponctualité. Les usagers râlent... Plus que ceux de Riga d'ailleurs, alors qu'objectivement (la neige mise à part) ils n'ont pas à se plaindre en comparaison des Lettons. Mais les Suédois sont habitués à ce que l'Etat assure tous les services auxquels ils estiment avoir droit, en contrepartie des impôts qu'ils payent (les plus lourds d'Europe). Les Lettons, eux, ne connaissent pas ce luxe. Jusqu'à ce que la neige ne tombe en quantité trop importante, chacun déblayait son pas de porte, tout seul.
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