De retour d'Oslo, entre deux nuages de cendres, avec des idées de projet à creuser. Il est encore trop tôt pour en parler. Ce que je peux dire ici, c'est qu'en traversant cette ville à pied, l'autre soir, pour aller de la gare à l'hôtel, j'ai été pris d'un sentiment - n'ayons pas peur des mots... - de bien-être. Le dégradé bleuté du ciel tirant vers la nacre, annonciateur des nuits claires d'été? L'impression de retrouver une ville que je commence à connaître un peu, depuis le temps? Le souvenir de mon 1er vrai reportage dans ce pays? C'était en novembre 1994, avec Pia, ma collègue anglophone de l'AFP. Les Norvégiens s'apprêtaient à dire "non merci" à l'Europe que leur proposaient la classe politique et les milieux économiques nationaux. Première rencontre concrète avec l'euroscepticisme pour le jeune journaliste que j'étais.
Là, en arpentant les trottoirs quasi déserts de Grensen, je me suis dit que j'avais beaucoup de chance de faire ce foutu métier. Malgré la mauvaise passe actuelle traversée par la presse, malgré les critiques récurrentes contre les journalistes et les médias, souvent mis dans un même panier bien pratique par leurs contempteurs. Comme si les choses iraient mieux sans personne qualifiée pour les raconter et les décrypter du mieux possible, selon des règles déontologiques parfois bafouées, souvent respectées.
En attaquant la rue pentue longeant le parc du château royal, je songeais aussi à cette région devenue mon terrain de "jeu" habituel. L'aiguillage vers le Nord ne s'est pas fait complètement par hasard, même si aujourd'hui je pourrais être en poste à l'autre bout du monde. Est-ce que je regrette cet enracinement? Non, disons que je n'y pense que très rarement. J'ai beau avoir l'impression de me répéter de temps à autre, je n'ai toujours pas épuisé mon sujet, loin de là. Le champ d'action est vaste, surtout depuis que je l'ai élargi aux Baltes. De quoi alimenter encore des années d'écriture et de reportages.
Quelques mots encore sur la méfiance de la Norvège à l'égard de l'UE. Au lendemain de ma balade vespérale, j'écoutais Geir Lundestad, le secrétaire du Comité Nobel norvégien et directeur de l'Institut Nobel, me raconter combien l'hypothèse d'un ralliement du royaume prospère à l'Union lui paraissait éloignée. "Je ne vois pas quel intérêt les Norvégiens auraient à rejoindre cette organisation, dont ils se sentent si éloignés. Le pays est devenu tellement riche grâce au pétrole!" L'historien, que je rencontrais pour un entretien à paraître dans la revue Politique internationale, avait fait, il y a pas mal d'années, un pronostic sur une possible date d'entrée de la Norvège dans l'UE: pas avant 2016, avait-il avancé dans un journal. "Aujourd'hui, je ne pense même pas que ce sera le cas", observe-t-il, en refusant de se risquer à tout nouveau pronostic...
C'est toujours sur la Karl Johans gate qu'une vague de bien être m'emplit également et m'invite à la réflexion. Est-ce parce que nous sommes au coeur du centre culturel et politique de la ville ? Est-ce l'étrange silence, même quand foule il y a ? La lumière ou la proximité du fjord ?
RépondreSupprimerHâte en tout cas de connaître votre projet.